Misère de la littérature – Rostom Djawad Touati

« Peut-être sur le plan purement formel : deux copistes qui s’exercent à reproduire la même vieille carte postale, sans doute l’un fera mieux que l’autre. Mais en définitive, ce sera la même nature morte, tandis qu’à côté, la vie réelle se déploie sous les yeux des vrais peintres, qui cherchent à saisir des moments clés de ce devenir » (Dj. R. Touati).   « Une idéologie est dominante seulement, et seulement si elle n’est pas perçue comme telle », disait Frank Lepage en paraphrasant Marx. C’est-à-dire si elle connaît un tel niveau de diffusion qu’elle semble aller de soi, que les représentations qu’elles charrient paraissent l’évidence même. Raison pour laquelle « le discours du mythe doit dissimuler aussi bien ses propres origines que celles de ce qu’il décrit » (Edward Saïd). Pour extirper les origines du mythe néocolonial, Nadir, le poète dilettante, s’engage à manier la rime en vers et contre tous les idéologues du défaitisme et de l’autodénigrement. Ce faisant, il trouvera en Lina, jeune universitaire et romancière prometteuse, un soutien aussi précieux qu’inattendu. En œuvrant à transformer le monde, les jeunes auteurs se transforment eux-mêmes, ainsi que leurs rapports. Alors que Lina réalise que « la liberté réside dans la transformation de ses propres déterminations » (Engels), Nadir dépassera-t-il enfin les conduites d’échec qu’il a sublimées en idéal de liberté ? Avec Misère de la littérature, l’auteur ferme les portes de sa trilogie risquée « Le culte du ça », et ouvre celles du débat sur la « question littéraire » : l’écriture.  

Les portes du poème – hommage à Habib Tengour

« Le Maghrébin est toujours ailleurs. Et c’est là qu’il se réalise » H. T. (Manifeste du surréalisme maghrébin,1981)   Les vingt-sept contributions ici rassemblées et superbement illustrées par Hamid Tibouchi – études critiques et textes de création – rendent hommage à une œuvre de premier plan dans les lettres algériennes et plus largement contemporaines, mais paradoxalement encore méconnue. Ce volume entend, à l’occasion du soixantième-quinzième anniversaire du poète Habib Tengour, inaugurer de nouvelles pistes de recherche quant à cette œuvre et permettre une plus juste appréhension de ses enjeux. Les hommages des pairs – poètes du monde entier – donnent à l’ouvrage une dimension affective, charnelle, et prolongent les analyses des chercheurs en ménageant des échos inattendus. « N’entre dans le poème que celui animé d’une intention droite ! », nous a avertis Tengour. Les portes du poème s’entrouvrent ainsi sur une des voix poétiques les plus importantes de sa génération (prix Dante en 2016 et Benjamin Fondane en 2022 pour l’ensemble de son œuvre).

Poussières d’itinérances – Badr’Eddine Mili

Sans la Révolution ‘‘Le Petit Chose’’, la toise à laquelle lordre des colons lavait mesuré, naurait jamais eu le privilège de rencontrer et de connaître autant de femmes et dhommes valeureux. Il naurait jamais eu la chance de parcourir le monde et de ramener, chez lui, autant de morceaux de planète ramassés au pied du Kilimandjaro et du Mont-Blanc, sur les rives de locéan Indien, de la mer Rouge et de la mer Morte, au bord du Tigre, de lEuphrate et du Saint-Laurent, le long des allées de Babylone, de Sarajevo, de Marrakech, de Damas et de Baghdad, dans la lointaine Dalmatie, sur les remparts de Dubrovnik, sur les berges du lac Victoria, sur les piétonnières de Bruxelles, dAnvers, de Londres et de Rome, au partage des eaux de la Sorgueportant la bonne parole du pays profond et devisant, avec des rencontres de passage, sur Lévi-Strauss, Tim Burton, Brink, Günter Grass et Marivaux pour qui ‘‘toutes les âmes ont le même âge’’…   B.Mili   Badr’Eddine Mili a visité, en 40 ans, une trentaine de pays et une cinquantaine de capitales et de villes importantes. Son exploration du monde l’a placé sur l’orbite d’une galaxie où il a vérifié que le voyage est la réalisation, sinon le prolongement, d’un rêve qui débouche toujours sur le savoir. Dans cet ouvrage, il a choisi de ne raconter que les voyages qui présentaient un intérêt en rapport avec la période, la durée, la portée culturelle et esthétique, les rencontres et la dimension politique concernées. Poussières d’itinérances est un mix de descriptions touristiques et d’analyses politiques d’évènements s’étant déroulés concomitamment, à mi-chemin entre un récit de voyage classique et un compte rendu, original, de missions professionnelles, avec une synthèse des genres qu’on ne trouverait dans nulle autre œuvre.